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Le concept citoyen

 
 

Par Me René Julien  
 
Le Citoyen d’un Etat est une personne apte à jouir, au sein de cet Etat, des droits exclusifs, particulièrement du droit de vote. Toute œuvre sociale et politique utile émane du Citoyen imbu de ses tâches. L'éducation à la citoyenneté se fait progressivement dans la famille, à l’école, à l’université, à partir des actes de la vie courante. Citoyen, on le devient.  
 
La qualité de citoyen s'obtient à partir d'un certain âge. La constitution haïtienne en son article 16-2 le fixe à dix-huit ans accomplis. L'État et la société reconnaissent au citoyen des droits et aussi des devoirs. Le citoyen est donc un produit typique de l’Etat qui l’a vu naître.  
 
A l’origine, le citoyen se faisait remarquer par sa fortune, par sa capacité à payer des impôts. A une autre période, il se distinguait par ses qualifications intellectuelles. Dans certains pays, Le travail a été l’un des critères pour conférer la qualité de citoyen. En France, par exemple, en 1791, le droit d’électeur, généralement reconnu au citoyen, n’a été accordé qu’à l’individu payant un impôt équivalent à trois journées de travail. « A chacun suivant sa capacité, à chaque capacité suivant ses œuvres », dit la formule.  
 
Une vie de citoyen est une vie d’épreuves, de grande responsabilité, d’extrême prudence, d’obéissance aux normes, de tolérance vis à vis de l’autre, de devoir envers sa patrie. Bref, une vie de citoyen doit être une vie honorable. 
 
Le Citoyen est le rempart de la vie publique. Dans une société moderne, tout émane de lui: connaissances, arts, inventions, technologie, organisation, pouvoir, règle régissant la vie publique. Il est considéré comme un véritable artisan de Bonheur collectif. Le citoyen est un produit de la société; tandis que l’être humain provient de la nature. Dans le langage biblique, le citoyen est un samaritain ; celui qui est toujours disposé à aider son prochain à sortir dans une situation pénible sans lui exiger une quelconque récompense.  
 
Le Citoyen haïtien  
 
Le citoyen haïtien est le titre que la Constitution de 1987 attribue à l’individu jugé apte à exercer des droits civils et politiques. A l’article 16 de cette constitution, nous lisons : « La réunion des droits civils et politiques constitue la qualité de citoyen. » Ces droits sont refusés aux mineurs, aux interdits. Des étrangers naturalisés haïtiens n’en ont la jouissance et l’exercice que sous certaines conditions prévues par la loi. Dans un Etat démocratique, le citoyen est le seul habilité à faire acte de souveraineté. La Constitution haïtienne en vigueur fait résider la souveraineté nationale dans l’universalité des citoyens (art 59). 
 
Les devoirs du citoyen haïtien  
 
Les devoirs de tout Citoyen se confondent avec la fonction originelle que lui impose la vie en société. Cette fonction a pour but de rendre agréable la vie collective par l’application des préceptes qui font référence aux valeurs fondamentales. Elle s’accomplit à travers une institution imperceptible que nous appelons “Institution Citoyenne” forgée par le temps et le besoin sans cesse grandissant des êtres humains de vivre mieux. La Constitution en son article 52-1 énumère ainsi les devoirs du citoyen :  
 
- respecter la Constitution et l’emblème national ;  
- respecter les lois ;  
- voter aux élections sans contrainte ;  
- payer ses taxes ;  
- servir de juré ;  
- défendre le pays en cas de guerre ;  
- s’instruire et se perfectionner ;  
- respecter et protéger l’environnement ;  
- respecter scrupuleusement les deniers et biens de l’Etat ;  
- respecter le bien d’autrui ;  
- œuvrer pour le maintien de la paix ;  
- fournir assistance aux personnes en danger ;  
- respecter les droits et la liberté d’autrui.  
 
 
Devoir du Citoyen envers la Justice  
 
Vis-à-vis de la justice, le citoyen haïtien est astreint au devoir :  
 
- de se défendre contre l’agression de gens malintentionnés  
 
- de faciliter les opérations de la justice ;  
 
- d’obéir aux ordonnances judiciaires ; 
 
- de collaborer avec la police en vue de prévenir les cas d’infraction, avec la justice en vue de la découverte des infractions et de l’arrestation de leurs auteurs ;  
 
- d’empêcher en cas de crime flagrant la fuite du délinquant: 
 
Au sein d’une société, le citoyen, en général, a pour mission de travailler et de participer à toutes les démarches devant concourir à l’administration et à la distribution d’une saine et équitable justice.  
 
L’ensemble de ces devoirs forme les attributions civiques reconnues par la Constitution et les lois du pays à tous les citoyens, dans le cadre de la fonction initiale que leur impose la vie en société. Un citoyen qui les enfreint commet une violation constitutionnelle ou légale. « Le devoir, dit Kant, est l’obligation de faire une action par respect pour la loi. » 
 
Le citoyen haïtien en butte aux difficultés de ses devoirs  
 
Les démarches haïtiennes, pour arriver à une structure favorable à l’application des devoirs civiques prévus à l’article 52-1 de la Constitution, sont totalement compromises par une gestion irresponsable de l’Etat ou « personne n’a plus à répondre de personne ». 
 
Comment demander, en guise de devoir civique, à un citoyen qui ne porte que le nom, de respecter la constitution et les lois de la République, de voter en toute liberté lors des élections, de payer des impôts, de porter secours, de dénoncer les actes attentatoires à la liberté, d’œuvrer pour le maintien de la paix lorsque son Etat, faute d’une gouvernance basée sur la constitution et les lois de la République, ne lui garantit aucun droit ? Le citoyen négligé, maltraité, oppressé ignore ses devoirs. 
 
L’article 52-1 de la constitution enjoint le citoyen à défendre le pays en cas de guerre. A cette fin, le service militaire est rendu obligatoire. Le démantèlement de l’armée rend inapplicable non seulement les dispositions de l’article 52-1 mais aussi, celles de l’alinéa 2 de l’article 268 de la Constitution consacrant le service militaire obligatoire pour tous les haïtiens âgés au moins de dix-huit ans. Le service militaire permet d’inculquer au jeune le sens de la citoyenneté, celui de la discipline, de l’honneur et du patriotisme.  
 
Le citoyen dépourvu est téméraire dans ses actes comme dans son jugement. Il peut même constituer un danger pour son propre pays. Il est dit quelque part : « Si… le citoyen jouit de ses biens en toute quiétude, il sent chaque jour croître et redoubler en son cœur non seulement l’amour pour son prince et son pays, mais aussi son attachement pour sa terre natale. » Notre échec collectif à opérer des choix difficiles et à préparer le pays à fonctionner dans la démocratie et le droit résulte sans nul doute d’un régime de citoyens dont les droits sont systématiquement bafoués.  
 
Il est temps pour nous, pour répéter le Président américain Barack Obama, de « faire disparaître ce qui était de l’enfant » pour agir en responsable. Il est temps de réaffirmer notre foi dans tout ce qui est susceptible de faire le bonheur collectif ; de choisir la paix plutôt que le conflit et la discorde. Chaque jour confirme la preuve que la voie empruntée, dans le cadre de la gestion d’Haïti, est génocidaire.  
 
Le citoyen dont les droits fondamentaux sont plus ou moins respectés est à même de faire montre de talents et de qualités susceptibles de rendre puissant son Etat. Les pays développés le sont justement parce qu’ils se font du souci pour le bien-être de leur peuple. La non garantie des droits par l’Etat anéantit les facultés mentales du citoyen, le détourne de la conscience des problèmes de son Etat.
 
 

 

 

La débâcle haïtienne  
(Extrait d’un ouvrage de Me René Julien)

 
 

La débâcle haïtienne a inspiré nos poètes, nos écrivains, nos compositeurs, nos musiciens, nos artistes peintres. Dans sa chanson titrée “Haïti, mélodie d’amour, le célèbre musicien haïtien, feu Ansy Desrose alerta en ces termes un psychiatre haïtien sur le mal du pays: “Docteur Bijou, le pays est en délire. Il s’enfonce dans l’abîme. Il se perd dans une mer boueuse”. L’artiste à sa façon lança en créole un cri d’alarme à l’intelligence haïtienne en vue du redressement de la situation. Des années s’accumulent, le pays reste sourd à ce cri.  
 
Le peuple haïtien, immature, pour la grande majorité, en matière de démocratie, n’a pas encore pris conscience de tous ses droits et de sa capacité d'imposer à la société, les changements qui lui sont favorables. Dans « Genèse d’une République héréditaire » publié par Maurepas Auguste, le préfacier Frank Laraque a écrit : « Plus le peuple comprend, plus il devient vigilant; plus il devient vigilant, plus il devient conscient qu’en définitive, tout dépend de lui et que son salut réside», permettez cette substitution, dans un règne de droit.  
 
En raison de graves problèmes structurels auxquels il est confronté, l’Etat haïtien n’est pas en mesure, depuis sa fondation, de connaître le nombre approximatif de personnes défavorisées pour lesquelles une politique de justice sociale serait nécessaire. La gestion arbitraire et anarchique de notre pays fait de nous un peuple sans registre, un peuple « ainsi connu », sans demeure établie, sans adresse réelle, ces éléments qui sont indispensables au fonctionnement du citoyen dans la démocratie. Pas de droit, pas de démocratie en dehors d’une organisation appropriée et bien structurée.  
 
Des chefs d’Etat Haïtien ont souvent utilisés des procédés discriminatoires, démagogiques et même criminels (distribution de billets de banque aux gens défavorisés, exploitation de la crédulité populaire, corruptions, manipulation des plus pauvres) sous prétexte de vouloir corriger les inégalités sociales.  
 
Ces reprochables comportements de nos hauts dignitaires vont à l’encontre des dispositions nationales et internationales relatives au respect de la dignité humaine. La constitution de 1987 plaide pour une politique pragmatique, attentive aux résultats, sur le plan des droits humains.  
 
Il est tant que les élites sociales, politiques et économiques haïtiennes dégagent une ligne démocratique commune axée sur le progrès humain. Les inégalités sociales sont la source de toutes les violences constatées en Haïti depuis l’assassinat de Dessalines le 17 octobre 1806. Promouvoir les valeurs morales, la dignité par le travail, le mérite par l’effort et la solidarité nationale, voilà la politique idéale à laquelle le peuple haïtien s’attendait après la promulgation de la constitution du 29 mars 1987.  
 
Contrairement à cette attente, la terre de nos ancêtres est prise en otage par un excès de violence, le plus souvent téléguidée; les institutions de l’Etat incontournables pour le maintien de l’ordre et de la paix ont été démantelées; le modèle économique Haïtien prôné par la constitution est volontairement ignoré au profit d’un plan néo libéral inadapté, les richesses dans notre sous-sol et dans notre fond marin restent inexploitables par nous même, lorsqu’elles n’ont pas été cambriolées par les étrangers avides. Nous avons abandonné la gestion de la sécurité de notre territoire et celle de notre justice entre les mains des étrangers.  
 
Sous prétexte d’entraide judiciaire en matière pénale, des compatriotes haïtiens soupçonnés en Haïti de trafic illicite de stupéfiants se sont vu, à l’initiative de leur propre gouvernement, distraire de leur justice, au profit d’une justice étrangère. Tant de fois, n’a-t-on pas constaté le drame selon lequel des compatriotes arrêtés et enchaînés dans des circonstances révoltantes sont jetés dans « la cale d’un avion » à destination inconnue pour se retrouver, après un jugement qui ne tient compte, ni de près ni de loin, des lois de la République, dans une prison de fer et d’airain où ils sont condamnés à purger une peine en dehors de toutes les garanties et protections judiciaires exigées par les lois internationales.  
 
Sur le plan social, la délinquance et la prostitution rongent notre pays à tous les âges et à tous les étages. Si l’on en croit les témoignages et certains faits vécus personnellement, on peut avancer sans aucun risque d’être démenti, que des fillettes et des garçonnets, à partir de l’âge de six ans ne sont pas épargnés. Une grande « coumbite » c’est-à-dire, un grand mouvement patriotique pour bâtir une Haïti moderne se révèle une nécessité nationale. La situation du pays fait perdre à nos concitoyens de plus en plus la confiance dans les idéaux de paix et de justice.  
 
Depuis un certain temps, au lieu de compter avec des citoyens intègres, loyaux, imbus des affaires publiques, aptes à agir dans le sens de l’intérêt collectif, notre peuple a préféré céder, par ignorance, aux discours des démagogues pour voter aux élections, des individus qui confondent la fonction de diriger et le devoir de dénoncer. « Si j’étais prince ou législateur, a déclaré Jean-Jacques Rousseau, je ne perdrais pas mon temps à dire ce qu’il faut faire. Je le ferais, ou je me tairais. »  
 
En matière de droits fondamentaux, le gouvernement du peuple doit agir pouvoir tenant. Il doit se préoccuper, chaque jour, du nombre de chômeurs à la recherche d'un emploi, des enfants défavorisés à scolariser, du nombre de jeunes désirant s'inscrire à l’université ou à une école professionnelle, des démunis en quête de soins de santé, des enfants de rue ou des vieillards abandonnés à placer dans un centre d’accueil, etc. C'est le sens du verbe « gouverner » qui ne se conjugue qu'au présent de l’indicatif. C’est aussi le prix, la promesse et l’exigence de toute démocratie.
 
 
 

 
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Modifié en dernier lieu le 29.12.2009
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